L’excellent blog Le cinéma est politique a publié, il y a quelques années déjà, une analyse du phénomène de muscularisation sous amphét des comédiens masculins du cinéma américain.

Cette tendance est exemplairement illustrée par l’évolution de Matt Damon, Brad Pitt ou Ryan Gosling, dont les silhouettes freluquettes des débuts ont vite disparu derrière les dizaines de kilos de muscles atrophiés devenues norme.

Cette tendance pourrait être comparée, semble-t-il, aux musculatures débridées des statues antiques ou des tableaux de Michel-Ange. Mais ce serait ignorer l’essence même du cinéma, où les corps des comédiens sont directement la matière des personnages, et non plus des représentations divines. À la limite, cela pourrait s’appliquer au cinéma d’animation, mais le phénomène est peut-être pire encore.

Cette obsession s’est même trouvée un nom – la bigorexie, et ses conséquences sont désastreuses, tant pour la santé des comédiens que pour l’évolution de la domination masculine dans nos sociétés.

Le dernier lien à nouer avec cette notion, non moins inquiétante, est que la même contamination semble affecter jusqu’à la moindre de nos rues, où la prolifération explosive de vigiles, militaires et autres bien nommées forces de l'ordre, s’accompagnent d’une même et démesurée surenchère de leur silhouette.